Hiver 2014-2015  
VOLUME 8 | NUMERO 3  
 

 
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Mot du président

Il faut passer de l’intention à l’action

Par Carl Yank

Président du Conseil de l’AQCIE et
Directeur général – Affaires Chlorite de sodium,
ERCO Mondial

Y a-t-il des industries au Québec ?

Comme vous, j’entends beaucoup parler des mesures de redressement des déficits des régimes de retraite des municipalités, des garderies, des commissions scolaires, mais très peu d’économie.

Et lorsque l’on parle d’économie, on enfile les statistiques négatives sur l’emploi, car même lorsqu’elles sont positives, comme en novembre, on apprend que le secteur manufacturier, lui, poursuit son déclin. On parle des promesses de 250 000 nouveaux emplois qui ne seront peut-être pas tenues. Plus récemment, l’Institut de la statistique du Québec relevait que le solde migratoire interprovincial du Québec était le pire depuis 1998, avec la perte nette de 13 500 personnes parmi les plus qualifiées et les plus mobiles que le Québec comptait.

Dans les documents entourant la relance de la politique énergétique du Québec, on remet l’accent sur les énergies renouvelables, sur l’exemplarité à laquelle les Québécois doivent aspirer, en ajoutant, en passant, qu’il faudrait aussi que la politique contribue à l’essor économique du Québec (voir l’article sur ce sujet).

Les mesures relatives à l’énergie contenues dans le Projet de loi 28, sur la mise en œuvre des dispositions du dernier budget, viendraient confirmer que les Québécois et les industriels québécois n’ont pas l’accès prioritaire à l’énergie patrimoniale, à faible coût, et que la Régie de l’énergie n’a pas à se prononcer sur les approvisionnements, laissant au gouvernement la possibilité de décréter autant de production additionnelle qu’il pourrait le désirer. La prévisibilité des tarifs d’électricité, un élément central dans la décision d’investir au Québec, en souffrirait grandement (voir à ce sujet le mot du directeur exécutif).

Qui n’avance pas recule

Or, la situation est dramatique pour les entreprises grandes consommatrices d’électricité qui, pour des raisons historiques, constituent le fondement de la structure industrielle du Québec. Dans les prévisions de livraisons d’Hydro-Québec Distribution, on apprend qu’en 2015 les livraisons aux industriels seront d’un térawattheure inférieures à ce qu’il était prévu encore l’an dernier. De près de 42 % de l’ensemble de l’électricité que HQD distribuait en 2006, la consommation des grands industriels aura sombré à moins de 32 % en 2015. Une chute de près du quart, en dix ans à peine.

Les emplois manufacturiers ont diminué du tiers au Québec entre 2002 et 2014 . Aux États-Unis, au contraire, les emplois manufacturiers et industriels sont en progression vertigineuse depuis quelques années, entraînant au passage la délocalisation et la fermeture d’industries québécoises. On réalise pleinement chez nos voisins du Sud à quel point les emplois manufacturiers sont structurants et essentiels à la création de richesse. Or, on s’en rend compte à tous les jours au Québec, la création de richesses joue un rôle essentiel dans l’offre de services aux citoyens.

Le gouvernement annonçait récemment un tarif d’électricité de développement industriel, de 20 % inférieur au Tarif L. En soit, c’est une bonne nouvelle, mais celle-ci vient aussi confirmer que le Tarif L ne suffit plus pour assurer le développement industriel du Québec. Même avec ce rabais, il est possible de trouver au sud de la frontière des tarifs industriels encore plus bas, sans contraintes ni retour, après 10 ans, à un Tarif L qui ne soutient tout simplement plus la comparaison. La fermeture de l’industrie Olin, à Bécancour, et sa relocalisation aux États-Unis sont venues tout récemment nous le rappeler.

Les annonces ne suffisent pas

Laisser le Tarif L perdre sa compétitivité et ajouter à l’instabilité des tarifs en intervenant directement dans leur fixation, comme le propose le gouvernement avec les amendements contenus dans la Loi 28, ne peuvent faire partie de la solution.

La croissance de l’activité industrielle, au Québec comme ailleurs, ne va pas de soi. Les grandes industries peuvent investir partout sur la planète, et leurs filiales nationales se livrent une concurrence sans merci pour attirer chez elles les investissements qui assurent leur pérennité. En pareil conjoncture, on ne peut se reposer sur le fait que le Tarif L ait déjà été concurrentiel. Il doit le demeurer, et sa progression doit être prévisible, sinon les investissements iront ailleurs. Il ne faut pas y voir là de menaces, mais un simple reflet de la réalité des marchés.

Pourquoi n’y a-t-il pas eu de grande implantation industrielle, ou d’ajout important de capacité dans les industries existantes, depuis plus de dix ans ? Poser la question c’est y répondre.

Conserver les acquis est déjà un défi

Si l’on n’y prend pas garde, le plus grand défi ne sera pas d’attirer de nouvelles industries ici, mais de préserver celles qui s’y trouvent déjà. Car même pour préserver une capacité de production existante, il faut investir dans le renouvellement des équipements, dans l’augmentation de l’efficacité des procédés et dans la qualité des produits, afin de maintenir la compétitivité avec les nouvelles usines qui se construisent hors du Québec.

L’activité industrielle ne va pas de soi, nulle part sur la planète. C’est pourquoi il faut, pour la maintenir et la faire croître, assurer constamment des conditions favorables. C’est aussi pourquoi le Québec doit dépasser le stade des intentions pour entrer rapidement dans l’action.

Pour les industries grandes consommatrices d’électricité, cela passe inévitablement par des tarifs industriels concurrentiels, stables et prévisibles. Malheureusement, les modifications relatives à l’énergie du projet de Loi 28 entraîneront tout le contraire. fin

Notes

  1. L’emploi manufacturier a chuté de 18 % des emplois québécois à seulement 12 % pendant cette période. Pierre Fortin, La maladie Hollandaise, c’est quoi, L’Actualité, 15 décembre 2014, p. 44

Notes

 

Nos meilleurs vœux de santé… et de prospérité !

En cette fin d’année, nous tenons à remercier les sociétés membres de l’AQCIE de leur soutien et de leur confiance, et à leur souhaiter, ainsi qu’aux lecteurs de L’Énergique, une année en santé et dans la prospérité.

Nous avons tendance à prendre l’une et l’autre pour acquis mais, avec le temps, nous découvrons que maintenir sa santé et atteindre la prospérité exigent au contraire une attention particulière et des efforts constants.

Les années 2013 et 2014 auront été particulièrement actives pour l’AQCIE et déterminantes pour le secteur de l’électricité au Québec. Déjà, 2015 s’annonce tout aussi riche en événements et en décisions qui auront un effet direct sur la santé des entreprises et sur la prospérité du Québec. C’est pourquoi l’AQCIE, de nouveau, ne ménagera aucun effort.

Au plaisir de vous retrouver dans la nouvelle année !

Joyeux Noël

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